Identification and analysis of the actors, practices and activities related to Christian finance - Identification et analyse des acteurs, pratiques et activités de la finance chrétienne

2016/08/25

Dom Pascal-André Dumont: "Peut-on être chrétien et faire de la finance?"


La question des rapports avec l’argent n’est pas simple mais par-delà les millénaires, les enseignements des prophètes et du Christ éclairent leur point d’articulation. Voix de l’Église, les Papes ne cessent d’appeler aujourd’hui à l’humanisation de la sphère économique et financière, non à sa désertion.

1. Dans les Évangiles, la richesse est un piège lorsqu’elle est érigée en concurrente de Dieu. En savoir +

2. Depuis toujours, l’Église encourage l’utilisation responsable de l’argent pour le bien commun de la société. En savoir +

3. Aujourd’hui, l’Église dénonce les dérives de la financiarisation, ou quand la finance gouverne les échanges économiques et sociaux au lieu de les servir. En savoir +

4. Mais les logiques de la finance ne sont pas intrinsèquement mauvaises. Bien comprises, elles s’intègrent dans un appel divin à la construction et au développement.  En savoir +

5. Ne pas fustiger la finance libère des initiatives financières chrétiennes au service du bien commun. En savoir +

Dom Pascal-André Dumont, prêtre, économe général de la Communauté Saint-Martin, est à l’origine de la création du fonds commun de placement éthique PROCLERO. 

2016/08/08

EXCELSIS - Analyse de l'entretien de Cédric Meeschaert au journal Les Echos


A l’initiative de son vice-président, il a été demandé au Comité Excelsis d’analyser l’entretien de Cédric Meeschaert, Président de la société de gestion Meeschaert, publié le 22/07/2016 dans Les Echos par Kévin Badeau sous le titre « Cédric Meeschaert met la finance au service du bien commun »[1] (ci-après l’« Article »).

ANALYSE

La société de gestion Meeschaert, pionnier en France dans la gestion d’actifs dite « éthique », est reconnue à juste titre comme ayant des valeurs humaines et chrétiennes dont elle s’efforce d’alimenter sa pratique professionnelle. Cela dit, l’Article met en évidence (i) un risque de confusion caractérisé entre, d'une part, des produits financiers chrétiens ou chrétien-compatibles et, d'autre part, des produits financiers non chrétiens, et (ii) des incompatibilités avec la Charte Fondamentale de la Finance Ethique Chrétienne, publiée le 15 août 2015 (ci-après la « Charte Financière Chrétienne »).

(i)                 Du risque de confusion

La société de gestion Meeschaert, agréée par l’AMF, est généralement identifiée par les médias et l’Eglise comme un acteur financier chrétien de premier plan. Dans l’Article, son rôle pionnier est rappelé fort à propos avec la création en 1983 du premier fonds éthique chrétien « Nouvelle Stratégie 50 » à l’initiative de Sœur Nicole Reille.

Cependant, il n’apparaît dans l’Article aucune distinction entre, d’une part, les fonds chrétiens et chrétien-compatibles gérés par Meeschaert (p. ex. Proclero, Ethique et Partage) et, d’autre part, les fonds éthiques sous-gestion incompatibles avec les valeurs chrétiennes.

Par conséquent, un risque de confusion est susceptible de causer un préjudice éthique et moral aux investisseurs en laissant entendre que certains placements ou produits proposés par le groupe Meeschaert sont compatibles avec l’éthique chrétienne alors que ce n’est pas le cas.

(ii)              Des incompatibilités avec la Charte Financière Chrétienne

L’Article offre une présentation tronquée des risques éthiques. Il est déclaré que la société de gestion Meeschaert investit « les actifs qui lui sont confiés, via des fonds communs de placement (FCP), dans des entreprises sélectionnées selon des critères éthiques et de développement durable. Parmi elles : Schneider Electric, Crédit Agricole ou Blue Solutions, soucieuses notamment de l'efficacité énergétique, de la prévention de la corruption ou encore de la santé des collaborateurs ».

Cependant, pour ne s’en tenir qu’à la société Crédit Agricole SA, les titres de celle-ci ne peuvent être présentés comme des actifs « responsables » au regard des principes établis dans la Charte Financière Chrétienne (article 2.3) alors que cette entité a été récemment mise en cause dans l’affaire des Panama Papers pour évasion fiscale via ses filiales offshore.

Par conséquent, sans qu’il soit besoin de rentrer plus en détail dans les sélections, certaines valeurs inscrites dans les portefeuilles gérés par la société de gestion Meeschaert sont manifestement incompatibles avec la Charte Financière Chrétienne.

De façon générale, l’analyse de l’Article laisse apparaître des manquements aux obligations visées par l’article 3.2. de la Charte, notamment l’obligation pour les acteurs de la finance chrétienne de s’efforcer à la prudence dans leur communication. Nous comprenons toutefois que le travail journalistique soit enclin à des raccourcis qui trahissent trop souvent la réalité, sans que cela dispense les acteurs concernés par leurs travaux à réagir de façon à préserver leur probité au regard de la Doctrine Sociale de l’Eglise.

CONCLUSION

Le Comité Excelsis rappelle que les acteurs financiers chrétiens ont la responsabilité de promouvoir une finance éthique ayant pour finalité un développement durable et vertueux visant le bien de tous et plaçant le bien de l’homme (et non le profit) comme premier objectif.

Si certains fonds éthiques sont susceptibles d’être reconnus comme chrétiens ou chrétien-compatibles, c’est toutefois à la condition qu’ils se conforment en tout point aux principes présentés dans la Charte Financière Chrétienne.

Afin de permettre des décisions d’investissement vertueuses et d’établir la confiance au sein du secteur financier éthique chrétien, les acteurs financiers chrétiens sont invités à toujours veiller à différencier, dans leur communication, les produits et services qui se conforment aux principes éthiques chrétiens de ceux qui ne s’y conforment pas (voir Codofine Position 2015-04).  

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Paris, le 8 août 2016

Comité Excelsis (ofccfo)